Les collectivités locales ignorent la rigueur

Les élus locaux n'ont pas lésiné sur les investissements et les embauches l'an dernier. Les chiffres de l'Observatoire des finances locales révèlent une poursuite des dépenses des collectivités au même rythme que les années précédentes. La palme revient aux communes, qui se justifient par l'année électorale. Les frais de personnel continuent, eux aussi, d'augmenter, à cause des recrutements mais aussi des hausses de charges décidées par l'État. Ces dépenses détonnent dans un contexte de fonte des recettes issues des transactions immobilières et alors que les élus imposent une fois de plus un alourdissement des impôts locaux à leurs administrés. En 2014, le comportement des collectivités devra néanmoins changer avec la baisse des dotations de l'État et la fragilisation de leur trésorerie. Les élus promettent désormais de réduire les investissements, mais pas les embauches, rythmes scolaires obligent.En 2013, les collectivités locales ont défié la rigueur. Dans son rapport annuel réalisé par des représentants des collectivités locales, l'Observatoire des finances locales reconnaît noir sur blanc que les dépenses en 2013 ont crû de 3,2%, soit la même pente qu'en 2011 et 2012. « Le rythme de croissance des frais de personnel semble indiquer que les effectifs ont continué à progresser en 2013 » euphémise également le rapport.Les élus ont visiblement fait la sourde oreille aux appels répétés à la sobriété des gouvernements successifs. Ils ont aussi fait fi du tarissement des recettes dû à la crise de l'immobilier. Un manque à gagner qu'ils ont essayé de compenser par d'autres recettes, en alourdissant la fiscalité locale de 1,9%. Les seuls impôts locaux ont progressé de 4,6%. Pas étonnant, dès lors, que leur besoin de financement soit passé de 700 millions d'euros en 2011 à 9,2 milliards en 2013. Soucieux de maintenir le déficit des finances publiques sous les 3% du PIB, l'État a fini par mettre les collectivités à la diète forcée. Leur dotation est amputée cette année de 1,5 milliard et les économies devront totaliser 11 milliards d'euros d'ici à 2017.Des signes de bonne volontéAndré Laignel, président du Comité des finances locales, justifie tous ces chiffres par l'augmentation des dépenses contraintes par l'État, passées de 1,3 à 1,5 milliard d'euros. « L'État nous demande des économies tout en nous imposant la mise en place des rythmes scolaires, la revalorisation des salaires des catégories C, les nouvelles exigences du Grenelle de l'environnement, etc. » Pour le maire d'Issoudun, les hausses d'effectifs résultent des demandes croissantes de la population, pour des crèches par exemple.Selon un autre expert des finances locales, le diagnostic n'est pas si négatif. Pour lui, les collectivités locales ont eu un comportement classique en année électorale. Les élus auraient même commencé à montrer quelques signes de bonne volonté en stabilisant la hausse de la fiscalité, en évitant d'atteindre certains niveaux d'endettement que l'on retrouvait auparavant dans ces années d'élections. André Laignel pointe en particulier une baisse de 26% des dépenses d'équipement. Ce qui semble indiquer que les collectivités ont préféré tailler dans leurs investissements plutôt que dans leurs dépenses de fonctionnement. L'expert rappelle que la pression de l'État ne commence vraiment qu'en 2014 et que c'est sur cet exercice qu'il faudra juger la réaction des élus. Le président du Comité des finances locales prévient que la politique de rigueur des élus qui s'annonce risque de peser sur l'emploi. Il cite les chiffres avancés par les lobbyistes du BTP, selon lesquels 60.000 emplois pourraient disparaître en 2016.En 2014, forte réduction des investissements et poursuite des embauches au programmeLa baisse des dotations de l'État a donné le signal. En 2014, les collectivités locales ont prévu de freiner sur les investissements, selon André Laignel. Cette tendance naturelle, après une année électorale, est cette fois amplifiée par l'inquiétude des élus face à la dégradation de leurs comptes, en particulier leur trésorerie fortement mise à contribution depuis deux ans. Une étude de La Banque Postale évalue même à 5,6% la baisse prévisible. En 2014, les recettes de fonctionnement enregistreraient la plus faible évolution depuis vingt ans. D'autant qu'André Laignel anticipe une accélération des embauches cette année pour absorber les nouveaux rythmes scolaires. Pour 2016, La Banque Postale s'attend à des investissements encore plus faibles, sous la barre des 50 milliards.